Le Pont National est un ouvrage d’art ouvert en 1853. Il vient relier la rive droite et la rive gauche à l’Est de la capitale, joignant les 12e et 13e arrondissement. Dès ses origines, il vise à permettre la circulation des véhicules, des piétons et des trains (entre la gare d’Austerlitz et la gare de Lyon). Il est situé à proximité immédiate de la gare de la Rapée-Bercy (côté 12e arrondissement) et du raccordement de Tolbiac (côté 13e arrondissement).
Élargi à plusieurs reprises (1936, 2011), il est aujourd’hui emprunté par les tramways de la ligne T3a, les véhicules automobiles, les vélos et les piétons. En revanche, les voies de la Petite Ceinture sont coupées au niveau du raccordement de Tolbiac par une opération immobilière (ZAC Seine Rive-Gauche) depuis 1994.
Le pont National, prolongement de la Petite Ceinture vers l’Ouest (1852 – 1853)
Situé à l’Ouest de la gare de la Râpée-Bercy, le pont National permet à la Petite Ceinture de traverser la Seine. Jusqu’à la construction du périphérique, il s’agit du premier pont de Paris lors de son entrée dans Paris.
Épingle bleue : gare de la Rapée-Bercy ; épingle orange : gares de la Rapée-Supérieure et Inférieure ; épingle jaune : Pont National
Le Pont National est construit entre 1852 et 1853 par les ingénieurs Couche et Petit. Il répond à un double objectif. « Il réunit les boulevards militaires des deux rives, en même temps qu’il sert au passage du chemin de fer de Ceinture », comme l’indique le journal Le Constructeur dans son édition du 15 janvier 1865.
Jusqu’en 1870, il porte le nom de « Pont Napoléon III ». Après la fin du Second Empire, il prend son nom actuel de « Pont National ». À l’Ouest, il est prolongé par le raccordement de Tolbiac, inauguré en 1853.
De fait, le pont est ouvert avant même le prolongement de la Petite Ceinture de la Chapelle à la Rapée, afin de permettre les échanges matériels entre la gare de Lyon et la gare d’Austerlitz.
L’ouvrage Histoire générale des ponts de Paris (paru en 1911), nous livre de plus amples informations sur son architecture.
« C’est le pont sous lequel la Seine fait son entrée à Paris, car il relie les fortifications.
Il est à double voie, c’est-à-dire qu’il sert à la circulation des voitures et des piétons et qu’il porte les rails du chemin de fer de ceinture.
Il est composé de cinq arches en arc de cercle de 34m. 50 d’ouverture et de 4m 60 de flèche, non compris deux arches de 12 mètres établies sur les routes qui bordent les deux quais.
La longueur entre les culées est de 188m 50. La largeur entre les têtes est de 15m. 40. Cette largeur est partagée en deux voies par une cloison, l’une de 7m. 74 réservée pour le service du chemin de fer de ceinture, l’autre affectée au passage des voitures et des piétons. On accède à cette dernière par des rampes et des escaliers ménagés à l’amont du pont entre les deux rives.
La dépense de construction du pont Napoléon III s’est élevée à 2.236.905 francs, prélevés sur les fonds réservés à la construction du chemin de fer de ceinture. Ce point est sans aucune ornementation ».
Doubler la largeur du Pont National (1934 – 1953)
Dans le cadre du Plan Marquet (voté le 5 juillet 1934 par l’Assemblée nationale), de grands travaux sont menés afin de moderniser certaines infrastructures – notamment routières et ferroviaires, comme l’indique le Génie Civil dans son édition du 23 février 1935. Face au développement du trafic automobile, le Pont National apparaît trop étroit (la partie réservée aux véhicules étant de seulement 6 mètres, comme le note journal Le Soir dans son édition du 27 novembre 1931).
Le 13 juillet 1935, le Conseil municipal de Paris approuve un programme de grands travaux exécutés par le service de la Voie publique. Il fait suite à un mémoire daté du 11 juillet 1934 du Préfet de la Seine. L’élargissement du Pont National est décidé. Le Journal Officiel du 3 octobre 1935 donne de plus amples détails sur la nature du projet d’élargissement du Pont National.
Ces travaux consistent à porter à 16 mètres 50 la largeur de la chaussée et à 3 mètres 85 les largeurs des trottoirs. L’élargissement sera supporté par 5 voûtes à 4 anneaux (3 anneaux en béton armé, 1 anneau en pierres de tailles) ayant même intrados que les voûtes du pont actuel.
Le projet comporte également la reconstruction en béton armé des travées d’accès au pont route avec les mêmes dimensions transversales et avec des portées de 17 mètres.
Un budget de 7.353.000 francs est alloué à l’opération. La largeur du pont est doublée, lui faisant prendre son aspect général actuel. La partie réservée aux chemins de fer est inchangée.
Les travaux démarrent en 1936, et devaient initialement être terminés en 1938. Faute de crédits, les travaux connaissent d’importants retards en 1939. Ils sont stoppés en juin 1942, et reprennent en 1944. Les travaux sont achevés le 25 juillet 1944. Cependant, en 1947, un emprunt de 35 250 000 francs est alloué par le Conseil municipal pour la finalisation de l’élargissement et des accès du pont National. Les derniers travaux, liés à ceux du boulevard Masséna, sont votés le 27 mars 1952 et s’achèvent en 1953.
Point notable, le tablier de la partie « élargie » est plus haute que la partie d’origine. Le niveau est donc harmonisé pour la partie routière – mais pas pour la partie ferroviaire, où passent les voies de la Petite Ceinture. Une curiosité que l’on peut toujours observer aujourd’hui, et qui est liée au passage de plusieurs canalisations sous la chaussée.
Un haut lieu des circulations ferroviaires exceptionnelles (1980 – 1990)
Au cours des années 80 et 90, de nombreuses circulations ferroviaires ont lieu au départ des gares de Lyon et d’Austerlitz, notamment en direction de la Petite et de la Grande Ceinture.
Ainsi, de nombreux trains spéciaux font halte sur le Pont National, permettant à de nombreux photographes de réaliser des clichés qui prennent aujourd’hui une valeur patrimoniale considérable.
Retrouvez ci-dessous une sélection de clichés de trains exceptionnels sur le Pont National :
Prolongement du T3 : élargir encore le Pont National (2011 – 2012)
Dans le cadre du prolongement de la ligne T3, le pont National est élargi une nouvelle fois. Il doit en effet accueillir :
- La double-voie de la Petite Ceinture ferroviaire de Paris (gabarit UIC) ;
- La double-voie du tram T3 ;
- 2 x 2 voies de circulation pour les véhicules routiers ;
- Deux voies pour les vélos ;
- Deux trottoirs pour les piétons.
Pour faciliter la circulation des piétons, la construction d’une nouvelle passerelle est décidée. Cette dernière prend la forme d’une passerelle métallique légère, conçue par l’architecte Christian Devilliers. Elle mesure 200 mètres de long, 4,1 mètres de large et comporte 9 sections fabriqués en Belgique, et acheminés en partie par voie fluviale.
Accolée au Pont National, cette passerelle n’a nécessité aucun appui supplémentaire sur la Seine. Conçue pour s’intégrer parfaitement avec l’ouvrage d’origine, elle est simplement accolée au Pont National. Elle s’appuie sur 7 jambes de forces en forme de V, qui se raccordent aux piles du Pont National grâce à une pièce spécialement conçue et encastrée dans du béton. Elle est revêtue d’une peinture blanche spéciale, doté d’un degré de brillance élevé (80 – 90 %), afin que les reflets de la Seine soient visibles sur la face inférieure de la passerelle.
Posée du 27 juin au 1er juillet 2011, la nouvelle passerelle métallique est présentée à la presse en avant-première le 5 juillet 2011. Le tram T3 circule sur le Pont National depuis le 15 décembre 2012, date d’inauguration du tronçon de 14,5 km entre les ports d’Ivry et de la Chapelle (avec terminus intermédiaire à la Porte de Vincennes).
Le point de départ architectural et urbain était de faire un ouvrage aussi discret que possible, assurant la parfaite et anonyme continuité en surface et évitant toute démonstration structurelle.
La démarche excluait donc le mimétisme mais cherchait au contraire une forme complètement autonome qui respecte l’intégrité de la façade existante et la mette en valeur. Une passerelle légère, accrochée à un pont apparemment lourd.
Agence Devillers
ZAC Seine Rive-Gauche, raccordement de Tolbiac et virgule « Picquand » : quel avenir pour la Petite Ceinture sur le Pont National ?
Le trafic ferroviaire sur la Petite Ceinture Rive Gauche s’arrête en 1993. Dès janvier 1994, la plateforme est coupée au niveau du boulevard du Général Jean Simon. Le raccordement de Tolbiac est supprimé, afin de permettre le passage des camions pour le chantier de la ZAC Paris Rive-Gauche – dont la Bibliothèque François Mitterrand est la première réalisation.
Cependant, le projet de la ZAC Seine Rive-Gauche prévoit le rétablissement de la liaison ferroviaire, tant pour la Petite Ceinture ferroviaire que pour le raccordement de Tolbiac. Ainsi, deux caissons aux dimensions imposantes ont été « réservés » dans les immeubles des îlots M5 et M6. À ce sujet, notre association demeure vigilante au sujet du futur immeuble de la parcelle M5B2, situé dans le prolongement du Pont National, et dont la construction n’a pas encore débuté.
À l’Est, côté 12e, l’avenir du Pont National est conditionné par la ZAC Bercy-Charenton, dont le projet a été remis à plat suite aux élections municipales de 2020.
Plusieurs projets prévoient la réouverture du Pont National au trafic ferroviaire. L’un des plus sérieux prévoit de l’utiliser afin de créer une jonction entre le réseau de Paris Sud-Est (gare de Lyon et gare de Bercy) et celui de la gare d’Austerlitz. En effet, cette dernière est vue comme une réserve de capacité pour le réseau ferré parisien.
Ainsi, un projet de virgule dite « Picquand » prévoit de créer une nouvelle jonction entre le faisceau aval de la gare de Lyon et le site de Tolbiac. Côté 12e arrondissement, ce raccordement partirait des voies M de la gare de Lyon. Il emprunterait un tunnel qui serait creusé pour passer sous le boulevard Massena et se raccorder au Pont National. Côté 13e arrondissement, le double-raccordement de Tolbiac serait reconstitué, en direction de la gare d’Austerlitz mais aussi vers les ateliers de maintenance de Tolbiac.
Les avantages de ce projet sont multiples. La gare d’Austerlitz pourraient servir de terminus à certaines liaisons grandes lignes afin de délester la gare de Lyon, qui est proche de la saturation. De même, certaines missions du RER D pourraient y avoir leur terminus. Un nœud ferroviaire pourrait ainsi être créé à la gare d’Austerlitz, en correspondance avec les lignes 5 et 10 du métro et la ligne C du RER.
Enfin, la gare « bis » de la Bibliothèque François Mitterrand, située le long des voies d’Austerlitz et du RER C, au pied de la bibliothèque et actuellement inexploité, pourrait servir au remisage de TGV. Cette gare « bis » présente également des correspondances judicieuses avec la ligne 14 du métro et la ligne C du RER.
Le Pont National et la virgule « Picquand » se placeraient donc au cœur du projet de montée en puissance du réseau Austerlitz.